RÈGLEMENT (UE) No 1215/2012 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
du 12 décembre 2012
concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale
(refonte)
(extrait)
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 67, paragraphe 4, et son article 81, paragraphe 2, points a), c) et e),
vu la proposition de la Commission européenne,
après transmission du projet d’acte législatif aux parlements nationaux,
vu l’avis du Comité économique et social européen,
statuant conformément à la procédure législative ordinaire,
considérant ce qui suit:
(...)
(13) Il doit y avoir un lien entre les procédures relevant du présent règlement et le territoire des États membres. Des règles communes en matière de compétence devraient donc s’appliquer en principe lorsque le défendeur est domicilié dans un État membre.
(14) D’une manière générale, le défendeur non domicilié dans un État membre devrait être soumis aux règles de compétence nationales applicables sur le territoire de l’État membre de la juridiction saisie.
Cependant, pour assurer la protection des consommateurs et des travailleurs, pour préserver la compétence des juridictions des États membres dans les cas où elles ont une compétence exclusive et pour respecter l’autonomie des parties, certaines règles de compétence inscrites dans le présent règlement devraient s’appliquer sans considération de domicile du défendeur.
(15) Les règles de compétence devraient présenter un haut degré de prévisibilité et s’articuler autour de la compétence de principe du domicile du défendeur. Cette compétence devrait toujours être disponible, sauf dans quelques cas bien déterminés où la matière en litige ou l’autonomie des parties justifie un autre critère de rattachement. S’agissant des personnes morales, le domicile doit être défini de façon autonome de manière à accroître la transparence des règles communes et à éviter les conflits de compétence.
(16) Le for du domicile du défendeur devrait être complété par d’autres fors autorisés en raison du lien étroit entre la juridiction et le litige ou en vue de faciliter la bonne administration de la justice. L’existence d’un lien étroit devrait garantir la sécurité juridique et éviter la possibilité que le défendeur soit attrait devant une juridiction d’un État membre qu’il ne pouvait pas raisonnablement prévoir. Cet aspect est important, en particulier dans les litiges concernant les obligations non contractuelles résultant d’atteintes à la vie privée et aux droits de la personnalité, notamment la diffamation.
(17) Le propriétaire d’un bien culturel au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 93/7/CEE du Conseil du 15 mars 1993 relative à la restitution de biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État member devrait avoir la faculté, au titre du présent règlement, d’engager une procédure civile en récupération dudit bien culturel, fondée sur le droit de propriété, devant les juridictions du lieu où le bien culturel est situé au moment de la saisine. Une telle procédure devrait être sans préjudice d’une procédure engagée au titre de la directive 93/7/CEE.
(18) S’agissant des contrats d’assurance, de consommation et de travail, il est opportun de protéger la partie la plus faible au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que ne le sont les règles générales.
(19) L’autonomie des parties à un contrat autre qu’un contrat d’assurance, de consommation et de travail pour lequel n’est prévue qu’une autonomie limitée quant à la détermination de la juridiction compétente devrait être respectée sous réserve des fors de compétence exclusifs prévus dans le présent règlement.
(20) Lorsque la question se pose de savoir si un accord d’élection de for en faveur d’une ou des juridictions d’un État membre est entaché de nullité quant à sa validité au fond, cette question devrait être tranchée conformément au droit de l’État membre de la ou des juridictions désignées dans l’accord, y compris conformément aux règles de conflit de lois de cet État membre.
(21) Le fonctionnement harmonieux de la justice commande de réduire au minimum la possibilité de procédures concurrentes et d’éviter que des décisions inconciliables ne soient rendues dans différents États membres. Il importe de prévoir un mécanisme clair et efficace pour résoudre les cas de litispendance et de connexité et pour parer aux problèmes résultant des divergences nationales quant à la date à laquelle une affaire est considérée comme pendante. Aux fins du présent règlement, il convient de définir cette date de manière autonome.
(...)
ONT ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:
CHAPITRE I
PORTÉE ET DÉFINITIONS
Article premier
1. Le présent règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction. Il ne s’applique notamment ni aux matières fiscales, douanières ou administratives, ni à la responsabilité de l’État pour des actes ou des omissions commis dans l’exercice de la puissance publique (acta jure imperii).
2. Sont exclus de son application:
a) l’état et la capacité des personnes physiques, les régimes matrimoniaux ou les régimes patrimoniaux relatifs aux relations qui, selon la loi qui leur est applicable, sont réputés avoir des effets comparables au mariage;
b) les faillites, concordats et autres procédures analogues;
c) la sécurité sociale;
d) l’arbitrage;
e) les obligations alimentaires découlant de relations de famille, de parenté, de mariage ou d’alliance;
f) les testaments et les successions, y compris les obligations alimentaires résultant du décès.
Article 2
Aux fins du présent règlement, on entend par:
a) «décision», toute décision rendue par une juridiction d’un État membre, quelle que soit la dénomination qui lui est donnée telle qu’arrêt, jugement, ordonnance ou mandat d’exécution, ainsi qu’une décision concernant la fixation par le greffier du montant des frais du procès.
Aux fins du chapitre III, le terme «décision» englobe les mesures provisoires ou les mesures conservatoires ordonnées par une juridiction qui, en vertu du présent règlement, est compétente au fond. Il ne vise pas une mesure provisoire ou conservatoire ordonnée par une telle juridiction sans que le défendeur soit cité à comparaître, à moins que la décision contenant la mesure n’ait été signifiée ou notifiée au défendeur avant l’exécution;
b) «transaction judiciaire», une transaction approuvée par une juridiction d’un État membre ou conclue devant une juridiction d’un État membre en cours de procédure;
c) «acte authentique», un acte dressé ou enregistré formellement en tant qu’acte authentique dans l’État membre d’origine et dont l’authenticité:
i) porte sur la signature et le contenu de l’acte, et
ii) a été établie par une autorité publique ou toute autre autorité habilitée à le faire;
d) «État membre d’origine», l’État membre dans lequel, selon le cas, la décision a été rendue, la transaction judiciaire a été approuvée ou conclue, ou l’acte authentique a été dressé ou enregistré formellement;
e) «État membre requis», l’État membre dans lequel la reconnaissance de la décision est invoquée ou dans lequel l’exécution de la décision, de la transaction judiciaire ou de l’acte authentique est demandée;
f) «juridiction d’origine», la juridiction qui a rendu la décision dont la reconnaissance est invoquée ou l’exécution est demandée.
(…)
CHAPITRE II
COMPÉTENCE
SECTION 1
Dispositions générales
Article 4
1. Sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre.
2. Les personnes qui ne possèdent pas la nationalité de l’État membre dans lequel elles sont domiciliées sont soumises aux règles de compétence applicables aux ressortissants de cet État membre.
Article 5
1. Les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre ne peuvent être attraites devant les juridictions d’un autre État membre qu’en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 7 du présent chapitre.
2. Ne peuvent être invoquées contre les personnes visées au paragraphe 1 notamment les règles de compétence nationales que les États membres doivent notifier à la Commission en vertu de l’article 76, paragraphe 1, point a).
(…)
SECTION 5
Compétence en matière de contrats individuels de travail
Article 20
1. En matière de contrats individuels de travail, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice de l’article 6, de l’article 7, point 5), et, dans le cas d’une action intentée à l’encontre d’un employeur, de l’article 8, point 1).
2. Lorsqu’un travailleur conclut un contrat individuel de travail avec un employeur qui n’est pas domicilié dans un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, l’employeur est considéré, pour les contestations relatives à leur exploitation, comme ayant son domicile dans cet État membre.
Article 21
1. Un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait:
a) devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile; ou
b) dans un autre État membre:
i) devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail; ou
ii) lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.
2. Un employeur qui n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions d’un État membre conformément au paragraphe 1, point b).
Article 22
1. L’action de l’employeur ne peut être portée que devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur a son domicile.
2. Les dispositions de la présente section ne portent pas atteinte au droit d’introduire une demande reconventionnelle devant la juridiction saisie de la demande originaire conformément à la présente section.
Article 23
Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions:
1) postérieures à la naissance du différend; ou
2) qui permettent au travailleur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section.
(…)
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